Commentaires sur le rapport d'activité pour le 49ème Congrès de la CFDT à Rennes du 4 au 8 juin 2018
Ce rapport d’activité, comme ceux déjà rédigés pour les Congrès précédents, est très complet et très bien rédigé. Il retrace très correctement la vie de la Confédération et plus globalement la vie de la CFDT pour au moins ce que j’en perçois. Si le style est forcément contraint, on voit de plus en plus apparaître un langage de communication (dialogue social plus de 40 fois pour 25 fois revendications et seulement 12 fois salaires). Ce rapport fait quand même 88 pages. Si l’exercice est réussi à mon goût, certains ont dû le trouver bien long.
Pour bien comprendre cet article : en orange, le texte du projet de résolution avec la numérotation du paragraphe (les parties en gras sont celles du projet de résolution). En noir, mes commentaires.
Aspects politiques et syndicaux
1.1.1 Si le Crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE) et les mesures du Pacte de responsabilité se sont traduits par une amélioration sensible des marges des entreprises, les contreparties en termes d’emploi et d’investissement ne sont pas encore visibles. On ne peut pas dire mois.
1.2.1 Très bonne réaction de la CFDT (suite aux attaques terroristes de janvier 2015) qui a conduit à la déclaration commune (sauf FO) intitulée « Vivre ensemble, travail ensemble ». Plus loin, la CFDT a exprimé fermement son désaccord sur la mesure de déchéance de nationalité aux binationaux de naissance. C’est très bien !
2.1 Depuis 20 ans, la CFDT défend les notions de sécurisation des parcours professionnels et de droits attachés à la personne, dans un cadre collectif. Le Compte personnel d’activité, associant personnalisation et universalisation des droits, et le droit à l’accompagnement sont pour la CFDT des avancées majeures de ce mandat, qu’il convient d’ancrer dans la pratique. En fait, on verra seulement le bien-fondé de la démarche dans 5 ou 10 ans. Cependant, il semblerait que le CPF ait déjà fait ses preuves surtout chez les demandeurs d’emploi.
2.2.4 La CFDT a également dénoncé et combattu, sans succès, les autres mesures des ordonnances qui facilitent le licenciement : réduction du périmètre d’appréciation du motif économique du licenciement au territoire national, allégement des obligations de reclassement des employeurs, facilitation des plans de départ volontaires collectifs, barème impératif pour les indemnités prud’homales. Oui, c’est bien, mais là encore, on ne pouvait pas faire moins.
La CFDT a par contre obtenu l’augmentation de 25 % des indemnités légales de licenciement pour les dix premières années d’ancienneté, ce qui concerne chaque année environ 1,5 million de salariés qui sont licenciés ou obtiennent une rupture conventionnelle. C’est très petit par rapport à la perte des acquis contenus dans les ordonnances Macron.
3.1 Dans sa première mouture, la loi Travail a été jugée inacceptable par la CFDT et les autres organisations réunies en intersyndicale, qui ont exigé du Gouvernement, dans un appel commun, de reculer sur plusieurs points durs. La CFDT, avec la CFE-CGC, la CFTC, l’Unsa et la Fage, a appelé à des rassemblements partout en France pour faire connaître ses propositions de modification avec un mot d’ordre : « Faut que ça bouge ! ». Oui, c’est vrai. Mais pieu de militants y ont participé.
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Laurent Berger lors du Congrès CFDT Nouvelle-Aquitaine le 5 décembre 2017 (Photo site internet CFDT) |
Le Gouvernement ayant expurgé le texte des points durs dénoncés par l’intersyndicale et repris l’ensemble des propositions CFDT, nous avons soutenu ce nouveau projet. Malgré la satisfaction des revendications intersyndicales, un mouvement d’opposition réunie autour de la CGT et de FO a poursuivi une contestation stérile. Il y a eu contestation, certes. Mais se rappelle-t-on comment cela s’est terminé, par le 49.3 !!
(Sur les ordonnances Macron) Notre appréciation est toutefois restée défavorable au final, face aux autres mesures contenues dans ces ordonnances, qui ont représenté un danger pour la loyauté et l’équilibre de la négociation et de trop grandes possibilités de contourner le dialogue social et les organisations syndicales, notamment dans les entreprises de petite taille. Ouf !! Mais la vraie question est de savoir s’il aurait pu en être autrement. En clair, aurions-nous dû nous battre davantage contre ces ordonnances ??
4.2 Lors du précédent mandat, nous avions constaté que face à la persistance des difficultés économiques et à la montée du poujadisme dans la société française, les organisationspatronales s’étaient radicalisées. Ce mouvement s’est poursuivi au cours de ce mandat ; les actions menées contre la mise en place du compte pénibilité par exemple l’ont parfaitement illustré. Force est de constater que le discours et les propositions patronales ont réussi à « imprimer », puisqu’ils ont obtenu des réponses politiques face à plusieurs de leurs revendications. Le choix du lobbying plutôt que celui du dialogue social marque leur stratégie. Cette incapacité des acteurs patronaux à se comporter en réels partenaires sociaux est un des principaux obstacles à la modernisation des relations sociales que la CFDT défend. Le syndicalisme que nous portons n’a pas en face de lui de partenaire fiable ni en capacité de s’engager. Les organisations patronales ne semblent pas avoir pris la mesure du changement qui s’est opéré dans le syndicalisme, suite à notre première place. Cela me semble très bien vu. Mais pourquoi faire du dialogue social le Saint-Graal des luttes syndicales alors que la CFDT reconnaît que les organisations patronales se sont radicalisées et qu’elles ont fait le choix du lobbying qui gagne. C’est ainsi reconnaître vouloir ou être contraint de faire du dialogue social tout seul. Le patronat a toujours eu la même ligne. Quand la droite est au pouvoir, il ignore les syndicats car le gouvernement fait une politique de droite qui lui va très bien. Quand la gauche est pouvoir, le patronat s’occupe un peu des syndicats pour que le gouvernement ne gouverne pas trop à gauche. Pour s’en convaincre, il suffit de chercher dans le passé même pas si lointain !!
4.2.2 Les résultats (des élections TPE) de la CFDT ont été décevants au regard del’investissement militant. En moyenne, la CFDT passe de 19,26 % en 2012 à 15,49 % en 2016 de taux d’audience auprès des salariés des TPE, soit une perte de 38 577 voix (3,77 %). À noter tout de même des éléments positifs : la rencontre des salariés a permis de nouvelles adhésions. On n’en a peut-être pas fait assez.
5.1 S’implanter grâce aux protocoles préélectoraux. Ce mandat a vu la mise en place d’une nouvelle prestation de la Cnas. On peut dire aujourd’hui que ce nouveau processus trouve sa place
dans les stratégies des équipes. Il faudra toutefois veiller à ce que les dépôts de listes CFDT soient assortis d’adhésions effectives. A lancer ou relancer pour les syndicats qui en ont les moyens !
5.5 Si la majorité de nos structures parvient à mener à bien leurs principales missions et projets, certaines sont en réelle difficulté. Le manque d’articulation entre les différentes structures génère des doublons dans les missions, ne permet pas une gestion optimale des ressources disponibles, n’empêche pas que certaines équipes se sentent insuffisamment soutenues. Le problème d’organisation est bien posé. Mais une fois de plus, il ne suffira pas de mutualiser nos moyens. D’autres ressources devrons être apportées (pourquoi pas par la CNAS ??). Le projet de résolution devra être très clair sur ce point.
Bilan et synthèse
Le bilan est vite fait. On a peu gagné (CPA et CPF, peut-être l’accord assurance chômage) et beaucoup perdu (Loi Travail, ordonnances Macron, accord montant des retraites complémentaires). Certes, tout n’est pas imputable à la seule CFDT, les autres OS n’ont pas fait mieux. Peut-être n’avons-nous pas réagi assez vide ou assez fort… Mais, on ne retrouvera jamais ce que l’on a définitivement perdu…
Je m’interroge toujours comment la CFDT, dans son ensemble, a pu passer de l’autogestion, au rapport Moreau, au rapport Grignard et maintenant au seul dialogue social ??
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